Carnet de route

Sortie Campana de Cloutou
Le 05/04/2025 par Rovira-Marcel
Sortie « Campana de Cloutou » du 25 au 27 mars 2025 organisée par Francis Lapeyre et animée par Éric Mignot
Les Pyrénées ne sont pas très loin, mais quand même un peu, alors d’abord, c’est la route. Depuis le virage du Garet, nous nous maintenons sur sa rive droite pour prendre la voie d’hiver, et ainsi éviter la zone avalancheuse qui accompagne les crêtes au-dessus du GR10 en cette saison. Puis rapidement, c’est le blanc manteau neigeux, encore sans traces " Rien que du blanc à songer [1] ", presque toujours en montant, plus ou moins raide, franchissement express des restes d’une coulée, un peu à flanc (ça va être plus laborieux le surlendemain à la descente) et hop, après un court repas sur le pouce en pleine neige, nous voilà arrivés au refuge, entièrement refait à neuf, accueillis et pris en charge par un jeune et beau et aimable gardien, je n’en dirai pas plus, au demeurant cuisinant bien, qui aussi nous rappelle les consignes de sécurité.
Le lendemain, la météo nous étant favorable, nous occupons le plus d’espace possible, à nous ici, il s’offre dans sa profondeur, seulement limité par sa lumière et sa beauté qui saisissent nos cœurs, et modestement y pourrions réciter comme Chantal Mauduit le fit, les vers d’André Velter :
« L’espace est un bandit d’honneur
c’est à lui que tu penses
quand tu suis le galop de ton cœur »
Le matin, donc, nous nous sommes hissés jusqu’à la Hourquette de Bracque 2335m, puis dans la foulée au col du Bastanet 2507m. Puis, une fois sagement restaurés, au chaud, au refuge, un brouillard à 10m s’étant installé tout autour, pour ne pas rester inactifs, six d’entre nous y sont partis faire une boucle. Du blanc partout, du blanc devant, du blanc derrière, du blanc à droite, du blanc à gauche, du blanc dessus, du blanc sous les pieds, un vrai cocon utérin, c’est la semaine du blanc, circulez, il n’y a rien à voir ! et pourtant nous avons circulé, en cheminant jusqu’au lac de Cloutou, un peu autour, et revenant par le sud jusqu’au bord du lac du Campana et enfin au refuge. J’ajoute ici la citation complète d’Arthur Rimbaud, décrivant son passage du col du Gothard, qui mieux que moi put le dire en 1878 « Voici ! plus une ombre, dessus, dessous ni autour, quoique nous soyons entourés d'objets énormes ; plus de route, de précipices, de gorge ni de ciel : rien que du blanc à songer, à toucher, à voir, ou ne pas voir, car impossible de lever les yeux de l'embêtement blanc qu'on croit être le milieu du sentier. »
Le troisième jour, le temps étant à nouveau clair et lumineux, c’est l’occasion de faire une visite au lac d’Arrédoun 2326m et au col de Couradette 2403m. Puis après une pause au refuge, pour nous restaurer, nous reprenons presque à l’identique, mais pas tout à fait, en le descendant, le chemin de montée du premier jour.
Voilà l’histoire est finie, et comme je suis en mal de citations, j’ai trouvé celle-ci, au hasard de mes lectures, qui indirectement fait l’éloge des carnets de route, elle est de Saint Augustin : « Sedis animi est in memoria (Le siège de l’esprit est dans la mémoire) ».
Pas de dérapages, restons modestes.
A+ sur les pentes.
Merci à Florence et Bernadette pour ici, leurs contributions respectives.
Photos Éric Mignot
[1] Arthur Rimbaud dans une lettre depuis Gènes